Douleur genou

Chirurgie mini-invasive des prothèses de genou


Certains chirurgiens sont pour la chirurgie mini-invasive des prothèses de genou, d'autres contre. Pour éclairer ce débat, abordons différents points de discussion :
• la qualité de l'exposition
• l'adaptation des instrumentations de pose
• la préservation des tissus environnants
• le type de patients pouvant en bénéficier
• les conséquences sur la technique chirurgicale
Prothèse genou : Douleur genou

Avantages de la chirurgie mini-invasive des prothèses de genou


Qualité de l'exposition

La plupart du temps il n'est pas nécessaire d'ouvrir largement l'articulation en luxant la rotule et sectionnant l'appareil extenseur sur une longue incision. A l'opposé, la technique MIS ne consiste pas à opérer par un trou de serrure. La longueur de l'incision cutanée n'est pas le plus important même si c'est ce que l'opéré verra après l'intervention.

Mais lorsqu'il est possible de mettre une prothèse par une petite incision pourquoi ne pas le faire?

Le point essentiel de la technique est d'exposer la partie spécifique du genou lors des différents temps opératoires en plaçant le genou au degré de flexion nécessaire: C'est ce que le professeur LASKIN de New York appelle "the window positionning ".
Pour visualiser le fémur, le genou est étendu de 0° à 45° de flexion. Pour visualiser le plateau tibial le genou est fléchi à 90°. Le genou n'est pas fléchi au delà sauf au moment de positionner et fixer le plateau tibial définitif. Cela est capital pour ne pas faire de lésion d'étirement des tissus environnants.

Cette technique demande de l'adresse et une certaine habitude de la chirurgie du genou prothétique. Il existe une courbe d'apprentissage.

La meilleure démonstration de l'intérêt de cette technique est le cas de la prothèse Uni Compartimentale (PUC) qui ne nécessite pas une grande incision cutanée ni une grande exposition chirurgicale comme cela se fait. Une incision de 10 cm maximum permet de mettre une PUC en toute sécurité, de diminuer les pertes sanguines et la douleur, de raccourcir le temps de rééducation et de séjour à l'hôpital.

Adaptation des instrumentations de pose
Il est possible d'opérer par MIS avec les instrumentations habituelles mais c'est relativement difficile sans risquer d'étirer les tissus, ce qui pourrait entrainer une nécrose et des douleurs post-opératoires.

La MIS est facilitée par une instrumentation adaptée fournie par les fabricants. De plus, l'adaptation des instruments classiques aux techniques de MIS a permis de faire des progrès quant à leur facilité d'utilisation et la précision des visées et des coupes osseuses pour une implantation plus fiable. C'est particulièrement vrai pour la technique de pose des PUC.

La préservation des tissus environnants
• La préservation de l'appareil extenseur tendino-musculaire en n'incisant plus le tendon quadricipital facilite la récupération rapide de l'extension active.
• La préservation du cul de sac synovial quadricipital évite la formation d'adhérences et facilite la mobilité en flexion post-opératoire.
• Une incision limitée entraine moins de douleur et de perte sanguine.
En conséquence, la rééducation sera facilitée et le séjour hospitalier diminué.

La voie d'abord midvastus, est une modification de l'arthrotomie parapatellaire interne qui permet une excellente exposition du genou. Les fibres du muscle vaste interne sont incisées dans le sens des fibres sur 3 cm, ce qui permet de ne pas rompre la continuité de l'appareil extenseur en comparaison de l'arthrotomie parapatellaire interne. De nombreux chirurgiens ont publié de meilleurs résultats avec cette voie.

Le type de patients pouvant en bénéficier
Le patient idéal pour cette technique doit avoir un genou pliant au moins à 110°, et un IMC < 25.

Les patients ayant une rotule basse, un genou déjà opéré, une obésité morbide, et une masse musculaire importante rendent difficile ce type de technique, et exposent à plus de complications post-opératoires que si l'on utilise une voie classique.

Les conséquences sur la technique chirurgicale
Jusqu'à présent, il n'y a pas eu de publications montrant une plus grande incidence de malposition ou de complications avec les voies MIS. Les différentes étapes de la technique d'implantation de la prothèse (positionnement, ancrage) sont parfaitement réalisées ainsi que tous les gestes complémentaires (ablation des ostéophytes, libération ligamentaires et capsulaires, équilibrage ligamentaire, centrage rotulien).

Les patients opérés par mini-abord ont une durée de séjour raccourci, une moindre consommation d'antalgiques, et une rééducation plus rapide que ceux opérés avec les voies d'abord classiques.

Le temps opératoire est le même lorsque le chirurgien a une pratique régulière. On peut considérer qu'il faut une courbe d'apprentissage de 25 à 50 prothèses pour un chirurgien ayant une bonne habitude de la chirurgie prothétique du genou.

Inconvénients de la chirurgie mini-invasive des prothèses de genou


Qualité de l'exposition
Si l'arthroscopie permet par une simple ponction une meilleure vision articulaire par l'introduction d'une optique, une mini-incision n'autorise pas une aussi bonne vision de l'articulation que par un large abord. La MIS peut conduire à des complications telles qu'un mauvais positionnement des implants, un étirement des tissus capsulaires et cutanés, un mauvais ancrage des implants, une infection.

La longueur limitée de l'incision est peut-être du bon marketing, mais chirurgie mini invasive ne veut pas dire mini-chirurgie; l'acte opératoire reste le même quelle que soit la longueur de l'incision.

Il y a plus de risque d'étirements des tissus cutanés et capsulo-ligamentaires du fait de la limitation de l'ouverture. Pourquoi traumatiser inutilement des tissus alors qu'un agrandissement de l'incision permet une exposition plus facile et sans danger?

Adaptation des instrumentations de pose
L'utilisation d'instruments classiques se révèle très difficile car non adaptée à ces mini-abords. Opérer à travers une petite incision fait courir plus de risque d'étirements des tissus cutanés et capsulo-ligamentaires, et de blessures des berges cutanées avec des scies oscillantes, reamers, ou râpes. Ces facteurs peuvent être la source de problèmes cicatriciels et d'infection. Se pose alors le problème de la qualité des gestes opératoires tels que les coupes osseuses, le positionnement des implants et leur ancrage.

Des instruments adaptés sont nécessaires; Mais la réduction de leur taille est porteuse d'imperfections: les broches de fixation des matériels de coupe sont plus rapprochées et de ce fait risquent de moins bien stabiliser les blocs de coupe osseuse entrainant une moindre précision dans la coupe, et donc un mauvais positionnement final de l'implant.

La préservation des tissus environnants
Dans la voie transvastus, on ne peut pas exclure la possibilité d'un dommage potentiel des structures neuro-vasculaires, alors que la voie d'abord classique (4) transtendineuse quadricipitale est vasculaire et sans danger. Cette voie classique peut avantageusement être agrandie à volonté en fonction des difficultés rencontrées.

Dans la voie subvastus, il y a trop de risques d'étirement des muscles et d'hématome pouvant aboutir à une irritation neuro-musculaire quadricipitale, du tendon rotulien et de la capsule avec des douleurs post-opératoires ralentissant la rééducation. Il est possible de ne pas éverser la rotule et de préserver le cul de sac quadricipital avec une voie classique.

Le type de patients pouvant en bénéficier

La CMI n'est pas possible pour tous les patients. Pour être sûre, il faut en exclure les patients porteurs d'une rotule basse, les obèses, ceux ayant eu une chirurgie du genou antérieurement, et ceux qui sont trop musclés.

Les conséquences sur la technique chirurgicale
Le temps opératoire est plus long car le chirurgien doit procéder à de multiples vérifications et des manouvres plus fréquentes à chaque étape de la chirurgie.
L'équilibrage ligamentaire et l'ablation des ostéophytes peuvent être rendu difficiles et incomplet par une petite voie d'abord.
La mise en place des implants définitifs peut être rendue difficile par une incision limitée. Le risque de malposition de l'implant, de mauvais cimentage, et de laisser en place des fragments de ciment mobilisable secondairement existe donc bien.

Résultats de la chirurgie mini-invasive des prothèses de genou


Lorsqu'on peut faire une intervention de prothèse de genou avec une incision limitée, pourquoi ne pas la réaliser?

Le but d'une opération étant de donner le meilleur résultat fonctionnel au patient le chirurgien se doit d'utiliser la meilleure technique limitant les traumatismes tissulaires, permettant une parfaite implantation et fixation de la prothèse, par une voie d'abord la Plus Petite Possible. Mais la chirurgie mini-invasive n'est pas un but en soit et n'est pas forcément synonyme de perfection. Le club des "chirurgiens mini-invasifs" n'existe pas. La chirurgie du genou ne se résume pas à la longueur de l'incision; il a été montré qu'une voie d'abord classique associée à un protocole anesthésique et analgésique adapté, et à un programme de rééducation bien mené permet d'obtenir le même résultat fonctionnel avec une voie d'abord classique ou une mini voie d'abord.

Le chirurgien n'est donc pas obligé de changer ses techniques classiques pour sacrifier à la "mode".

Un bon résultat de prothèse articulaire est du à plusieurs facteurs :
1. sélection et préparation pré-opératoire du patient
2. technique opératoire atraumatique
3. protocoles d'anesthésie modernes
4. protocoles de prise en charge de la douleur
5. protocoles de rééducation accélérée
6. on peut ajouter un autre facteur: le chirurgien avec son savoir et sa pratique.
- sa technicité et son habitude de la chirurgie du genou
- son entrainement à poser des prothèses
- sa formation continue

Tous ces facteurs influencent le choix technique et le résultat final.