Douleur genou
Qu'est-ce que la douleur au genou ?
La douleur est un phénomène subjectif et individuel, ce qui la rend difficile à expliquer. Aussi, pour les autres, pour votre entourage, il n'y a pas de preuve formelle de votre douleur et de son intensité. On ne peut pas non plus la mesurer comme la température ou la tension artérielle. Les radiographies réalisées peuvent montrer des images d'arthrose, mais on ne peut pas savoir si l'arthrose est douloureuse sans poser la question à la personne. On sait également que le seuil de la douleur est variable d'un individu à l'autre : certaines personnes sont plus « dures au mal » et d'autres plus « douillettes ». En biologie, ces différences sont en fait habituelles, comme les variations de poids, de taille, etc. Le problème est que ces variations de sensibilité peuvent entretenir le doute sur la réalité ou l'importance de la douleur : les personnes qui disent souffrir peuvent être suspectées d'exagérer.
Les différents types de douleurs au genou
La douleur fonctionne initialement comme un signal d'alarme. Son principal rôle est de protéger l'organisme. Sans elle, nous ne prendrions pas conscience qu'il existe une lésion « physique » (par exemple une poussée d'arthrose). Elle nous incite donc à faire attention à la zone lésée et à demander des soins.
Lorsque la douleur persiste, n'est pas calmée par les antalgiques, elle peut aussi se mettre en mémoire, être entretenue par certaines attitudes ou comportements. Elle peut persister, même si la cause initiale est en voie de guérison ou a disparu.
Douleurs aiguës et douleurs chroniques
Prenons par exemple, une poussée d'arthrose : dans la zone lésée, il y a libération locale de substances qui provoquent l'excitation des récepteurs, c'est-à-dire des extrémités nerveuses spécialisées des fibres nerveuses ; ces récepteurs envoient un signal d'alarme au cerveau : « Alarme ! ». Il s'agit là d'une douleur aiguë.
Si la douleur provoque diverses conséquences physiques (diminution et évitement des activités) ou psychologiques (insomnie, démoralisation, anxiété), ces conséquences peuvent devenir des facteurs d'entretien et d'amplification qui contribuent à ce que les douleurs s'installent, durent, se répètent. Ces douleurs là n'ont pas de caractère protecteur bénéfique ; elles sont inutiles, invalidantes même.
Différence entre douleur « normale » et douleur persistante rebelle
Dans le cas de l'arthrose, il est légitime que l'articulation abîmée soit douloureuse lorsqu'elle est mise en activité. Chez certains patients, la douleur peut persister, bien que la cause initiale soit correctement traitée.
La douleur est alors considérée comme une maladie à part entière. On peut parler de douleur-maladie lorsque les conséquences physiques, psychologiques viennent participer à la douleur. Le cercle vicieux de la douleur chronique peut entretenir la douleur. Nous allons décrire comment ne pas tomber dans les pièges de ce cercle vicieux.
Comparaison entre douleur « normale » (aiguë, récente) et douleur maladie (chronique)
Si une douleur persiste plusieurs mois, ses conséquences peuvent devenir plus importantes que celles de la cause initiale. L'analyse des conséquences de la douleur, donne une clé pour en comprendre sa persistance. Cette analyse est essentielle pour trouver des solutions pour atténuer la douleur. Elle repose sur l'hypothèse que chaque détail peut avoir son importance : composantes physiques, psychologiques et comportementales. Chacune de ces composantes peut être la source de l'entretien de la douleur. À l'extrême, il peut arriver que, bien que la cause initiale de la douleur ait disparu, cette dernière persiste tout de même.
La douleur persistante est donc entretenue par de multiples facteurs. Il est donc logique d'associer diverses thérapeutiques médicamenteuses et non médicamenteuses pour faire face à l'ensemble des problèmes qui entretiennent ou génèrent une douleur chronique. C'est pourquoi agir sur un seul des facteurs est insuffisant si les autres n'ont pas été pris en compte. Cette prise en compte simultanée de toutes les facettes d'une douleur (physiques, psychologiques, familiales, sociales) permet de désamorcer le cercle vicieux responsable de la persistance de la douleur.
Les mécanismes physiologiques de la douleur
Le contrôle de la douleur
Il existe de nombreux relais dans la moelle épinière jusqu'au cerveau, où s'effectuent des modulations de la transmission des sensations de douleur par des mécanismes de contrôles :
. certains ont des effets facilitateurs (la douleur est accentuée) ;
. certains sont inhibiteurs (la douleur est réduite).
Le niveau d'intensité d'une douleur dépend du déséquilibre entre les effets facilitateurs et inhibiteurs.
On a démontré, par exemple, que la sensibilité du toucher (massage, pression.) exerce une action inhibitrice sur la sensibilité douloureuse.
Il existe des substances naturelles, appelées endorphines qui possèdent une action puissante d'inhibition de la douleur semblable à celle de la morphine. On sait en effet depuis longtemps qu'une douleur peut être inhibée par un massage, une pression, et que lorsque deux douleurs surviennent simultanément, la plus violente inhibe la plus faible.
Les mécanismes de contrôle sont mis en jeu par des facteurs psychologiques. Par exemple la signification plus ou moins anxieuse donnée à une douleur intervient pour beaucoup dans les différences de perception des douleurs. L'incertitude, l'absence d'explication sur une douleur peuvent faire craindre une cause grave, et augmenter la douleur.
Le rôle des contrôles inhibiteurs de la douleur est important à retenir car ceux-ci sont le fondement du traitement de la douleur. Ces contrôles inhibiteurs sont sous la dépendance de plusieurs influences :
. La condition physique ;
. L'attention ;
. L'angoisse, la peur d'avoir mal, la peur du lendemain, le stress.
Les mécanismes d'entretien de la douleur
Si une douleur persiste et devient chronique, c'est parfois à cause de lésions anatomiques qui persistent (par exemple une inflammation) mais c'est souvent à cause de l'entretien d'un ou plusieurs cercles vicieux. On peut comparer les mécanismes d'entretien de la douleur à ceux de la mémoire : même si le trouble initial est guéri et qu'il n'y a plus de lésion, le système nerveux peut en garder la trace, le souvenir. De nombreux facteurs contribuent à perpétuer ou à augmenter une douleur.
1. Les tensions et les contractions musculaires
Une douleur peut s'accompagner de contractions musculaires réflexes. Le muscle contracté devient alors le siège d'une nouvelle douleur. Celle-ci favorise à son tour une nouvelle contraction, et ainsi de suite. Il est donc capital d'apprendre à bien exécuter les gestes de la vie quotidienne, afin d'éliminer les mouvements parasites, sources de contractions musculaires inutiles, et donc de douleurs. Le stress, lui aussi, est un facteur supplémentaire de contractions inutiles.
2. L'attention
Parmi toutes les sensations, la douleur est celle qui capte le plus notre attention. Il est difficile de s'en détacher, elle devient le centre de nos préoccupations, nous nous « focalisons » dessus, nous sommes « à l'écoute de notre corps ». Mais avoir son attention focalisée sur sa douleur, ne plus s'en détacher, jusqu'à ne plus avoir d'activités professionnelles ou de loisirs, tout cela contribue à entretenir sa douleur.
Il existe toutefois un niveau au-dessous duquel l'attention peut être portée ailleurs : la douleur peut être oubliée. Le traitement doit donc comporter des techniques dont le rôle est de diminuer l'attention que nous portons à la douleur, ou nous aider à en détourner notre attention.
3. L'anxiété
Une douleur qui persiste fait croire à la personne qui souffre que son cas est très sérieux puisque rien ne la soulage vraiment. L'appréhension, la crainte de l'inconnu, la peur, entretiennent aussi sa douleur.
Cette anxiété est souvent injustifiée dans la mesure où, dans la majorité des cas, la cause des douleurs n'est pas grave, et que les douleurs les plus violentes ont été déjà ressenties. Les consultations doivent permettre, grâce à une bonne compréhension des mécanismes, de dissiper bon nombre de facteurs d'anxiété.
4. La démoralisation
Les douleurs s'accompagnent fréquemment de signes de démoralisation ou de dépression : on se retrouve sans énergie, on ressent une perte d'intérêt pour la vie, une tristesse, on manque même d'estime de soi. Cette dépression peut être méconnue de la personne atteinte, ou même déniée. On parle dans ce cas de « dépression masquée », et il faut alors agir, car cet état empêche la personne dépressive de trouver l'énergie et les ressources nécessaires pour « récupérer ».
5. L'insomnie
Un sommeil insuffisant ou de mauvaise qualité peut aussi contribuer à entretenir une douleur. Le manque de sommeil (après une nuit blanche par exemple) peut parfois causer à lui seul des douleurs diverses : courbatures, maux de tête.
6. Le stress
Le stress est un facteur fréquent d'amplification et d'entretien de la douleur pour la plupart des personnes souffrant d'arthrose. Le mot stress en anglais veut dire « effort, tension ». C'est une réaction de l'organisme, face aux facteurs d'agression physiologiques et psychologiques ainsi qu'à des émotions agréables ou désagréables. C'est donc une situation de contrainte qui nécessite de la part de l'individu une réaction d'adaptation. Cette réaction peut en théorie être bénéfique ou nocive.
Chez la personne qui souffre de douleur persistante, les situations de stress sont souvent source d'accentuation de la douleur. Les situations sont extrêmement variables et propres à chaque individu :
. Parler en public ;
. Savoir attendre, savoir dire non ;
. Gérer les difficultés relationnelles avec des proches ou des collègues de travail ;
. Affronter des événements pénibles de la vie (divorce, deuil, traumatismes variés, etc.) ;
Le stress est souvent associé à des émotions (colère, agressivité, anxiété, démoralisation.), et à des manifestations telles que tensions ou contractures musculaires qui peuvent accentuer la douleur. La douleur fragilise l'individu soumis au stress et le stress accentue la douleur. Le cercle vicieux douleur-stress est fréquent chez la personne qui souffre de douleurs persistantes.
L'impact psychologique de la douleur
La douleur a un impact psychologique. Le mot psychologique irrite souvent, car votre douleur est bien réelle. Au fil des mois ou des années, la douleur va poser des problèmes et des difficultés psychologiques. Cela ne veut pas dire que vous soyez un « malade mental ». Vos réactions sont normales et elles doivent être comprises, car avec la douleur vous vous sentez plus facilement « stressé », « angoissé ».
Quelle que soit la cause de la douleur, avec le temps, elle provoque diverses réactions psychologiques : anxiété, insomnie, fatigue, tension nerveuse, repli sur soi, démoralisation, dépression, parfois désintérêt sexuel, etc. Ces réactions contribuent à entretenir votre douleur. Ainsi s'installent les cercles vicieux qui ont été évoqués.
Les conséquences sont nombreuses. Par exemple, vous avez cessé de travailler, ou votre travail s'est modifié, ou vous devez changer de poste de travail. Vous n'avez plus de loisirs. Vous n'avez plus d'activités qui vous plaisent. Vous ne sortez plus, vous ne voyez plus vos amis. Vos relations avec vos proches se sont transformées, vous vous sentez incompris, vous vous sentez isolé. Vos proches ne comprennent pas (ou plus) votre douleur, ils pensent que vous exagérez ou que « c'est dans la tête ».
Dans tous ces cas, il importe d'apprendre à vous protéger des nombreux pièges tendus par la douleur qui dure et d'apprendre à faire face au mieux.
Attention et douleur
Les phénomènes d'attention jouent un rôle capital dans toute douleur chronique. Ils constituent la base de certains traitements, de certaines techniques pour lutter contre la douleur. Il est important de comprendre pourquoi, de temps en temps, lors de certaines activités, vous ne pensez plus à votre douleur et n'avez pas mal ou moins mal. Comme toute perception, la douleur est influencée par des phénomènes de distraction, de détournement de l'attention.
Diriger son attention c'est fixer son esprit sur quelque chose de particulier et, de ce fait, délaisser d'autres sources d'information. Les études scientifiques confirment qu'une douleur augmente lorsqu'un sujet est préoccupé par sa douleur, lorsque son attention est focalisée sur sa douleur.
Voici un exemple pour bien comprendre
Au cours d'une réunion d'amis, vous pouvez choisir deux conversations : une qui est bruyante et sans intérêt ; une autre qui est discrète, plus difficile à écouter mais tellement plus intéressante. Votre organisme, votre cerveau, doivent faire une sélection. Vous devez détourner votre attention de la conversation bruyante, pour mieux vous concentrer sur la plus discrète. Dans cet exemple, la douleur peut être comparée à la conversation bruyante et dépourvue d'intérêt : tout doit être fait pour ne pas l'entendre. Détourner son attention vers des conversations intéressantes, c'est, dans le cas de la douleur, prêter attention à toutes les occupations, loisirs, discussions ou activités qui éloignent l'esprit de la douleur. Dans la douleur-chronique, tous les moyens doivent donc être mis en oeuvre pour moins ressentir la douleur. Moins penser à la douleur, s'habituer, c'est permettre à l'attention de se fixer sur des activités autres plaisantes et motivantes, avec des sources d'intérêt (émissions de télévision, musique, conversations intéressantes, entre amis, loisirs, repas chaleureux, coiffeur, lecture.). Celles-ci exercent un effet dérivatif qui atténue fortement la perception de la douleur et parfois la supprime complètement. Lors d'un match de football, les joueurs peuvent subir des traumatismes sans ressentir de douleur immédiate. L'absence de douleur s'explique ici par un état d'attention intense du fait de l'intérêt porté au match. La douleur réapparaît plus tard lorsque l'attention redevient normale. À l'inverse, l'absence d'occupations, l'inactivité laissent l'esprit disponible pour la douleur. L'attention est alors monopolisée par la douleur et c'est le cercle vicieux.
Accepter la réalité de votre douleur
Il faut admettre que votre arthrose douloureuse qui persiste peut s'accompagner de difficultés, et de répercussions personnelles, psychologiques, socioprofessionnelles (peur de reprendre le travail par exemple). Il faut comprendre que votre entourage puisse réagir, soit en vous protégeant à l'extrême, avec bienveillance, soit en vous rejetant.
Les manifestations de votre douleur perturbent la communication avec votre entourage, et les réactions négatives de celui-ci participent au maintien de votre douleur. Il faut également comprendre que ceux qui vous aiment ne peuvent être indifférents à votre douleur, et ne savent pas, pour autant, comment réagir. Ils peuvent alors être agressifs ou paraître indifférents. Savoir communiquer, sans évoquer à chaque occasion votre douleur, est souvent bénéfique.
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